mardi 19 janvier 2016

Auteur:  Michel Marchand  cadransolaire@cgocable.ca

La légende de Johnny Spark

Au soleil levant dans la douce fraicheur du matin, une fine brindille d'herbe entre les dents, Johnny Spark regarde dans ses rétroviseurs s'éloigner doucement le profil enflammé des vitres des grattes-ciel de San Francisco et s'enfonce plein Sud dans la voie centrale de la Ventura Freeway 101, direction Los Angeles. L'hymne national des motards d'Amérique ''Born to be Wild'' frappe fort dans son casque d'écoute haute-fidélité. Cette musique, cette complainte, c'est la vie, la rage, l'amour, la mort tout comme est la Toccata et fugue en ré mineur de Jean-Sébastien Back. Une juste et noble comparaison pensa Johnny qui n'eut été de son épais blouson de cuir, aurait montré des frissons sur toute la longueur de sa colonne vertébrale. Sa moto, une magnifique Harley Davidson 1948 chromée comme il se doit, à l'engin intelligemment , puissamment modifié, presque à la limite de la rupture des métaux, occasionnant d'excessives vibrations, il la sentait comme un doux ronronnement de chaton, et il avala ainsi comme un poignard projeté à vive allure, les centaines de kilomètres séparant les deux grandes mégalopoles longeant la côte ouest américaine.

Homme de grande prestance, d'un calme désarmant et d'un sens de l'honneur inébranlable aussi vif que le tranchant de la lame d'une épée de samouraï, Johnny Spark allait de par tout l'ouest de l'Amérique du Nord à la rencontre des divers embranchements de la plus célèbre et richissime horde de motard désignée sous le nom de Dark's Angels. Il se devait d'y faire respecter le code de l'organisation dans toute sa rigueur.

Quoiqu'il usa plutôt de sa grande force de persuasion et qu'il n'eut jamais à se servir d'une arme, il dissimulait à bonne portée dans un bel étui de cuir placé sur la fourche avant, un Colt 45 à la crosse de nacre rosée, admirablement ciselée à la main provenant de la marine américaine, à fort impact, capable, tel un violent coup de masse, de projeter un homme par terre à cinquante mètres. Mais ce qui le distinguait davantage des autres membres et ce pourquoi on le respectait par dessus tout, un simple dessin presqu'aussi rare que la Joconde, tatoué sur l'avant-bras droit, le seul qu'il se devait de porter, facilement repérable lorsqu'il tordait  la poignée d' accélération de sa forte cylindré: la mythique et redoutable Dame noire, délicatement couronnée des trois branches de laurier à feuilles vertes entrecroisées, d'une terrible beauté, si terrible, tel l'implacable pouvoir de Jules César, qu'il lui donnait le droit de décider du sort de quiconque se détournait du code d'honneur. Une espèce de chèque en blanc décerné au porteur par l'organisation suprême et, s'inspirant d'une phrase célèbre dont son Éminence le Cardinal de Richelieu usait dans le plus grand des secrets, avec parcimonie: ''Fais ce que doit'', imprimé dans sa chair, en dessous de l'Œuvre.







Un mauvais souvenir

Renié par son père à l'âge de 16 ans pour avoir accidentellement mis le feu à la maison familiale, il traîna ses savates comme un clochard dans de nombreuses grandes villes Américaines. En 1981, il se retrouva à San Francisco à ronger sa peine et sa douleur mais au 21 juillet de cette même année, un incident changea irrémédiablement le cours de sa vie.
En haillon, face à la mer, une pinte de scotch à la main sous les regards suspicieux des passants et des autorités, Johnny Spark se mit à faire défiler dans sa tête, cette tragique scène de la petite route de terre de son enfance. Il voyait encore le doigt de son père sur son front: ''Je te renie comme mon fils, vas par les routes et les champs, tu n'as plus ta place ici. « ta famille est dans la misère par ta faute, je te le redis, je te renie comme mon fils '' et lui frappa lourdement le visage à main ouverte et à pleine force, si bien que Johnny s'écroula en pleurs face contre terre et que la poussière s'élevant de la petite route de terre de son enfance n'arrivait même plus à étancher ses larmes.

Puis, claquant comme un coup de fouet, une terrible explosion sortie Johnny Spark de sa rêverie cauchemardesque. Dans un entrepôt abandonné de l'autre côté de la rue rapidement devenue en flamme, quatre costauds en sortirent en torche et s'écroulèrent sur le trottoir. Promptement, Johnny Spark se leva de son banc, courut vers la déflagration et lorsqu'il entendit des hurlements provenant de l'intérieur de la construction, il pénétra dans les décombres. Au travers d'une épaisse fumée, il parvint à se faufiler, à passer outre les flammes pour se diriger vers les gémissements qu'il avait maintenant peine à entendre. Après une minute ou deux de marche infernale à dégager les poutres à coup de pieds et de coudes, il était devant la victime dont les vêtements semblaient vouloir se consumer. D'un geste précipité, il l'enroba de son long manteau de vagabond, le porta sur son épaule comme une poupée de chiffon jusqu'à ce qu'il perçoive une ouverture et il sortirent du brasier.

Sur le trottoir, les secouristes mirent immédiatement le masque à oxygène aux blessé et voulant faire de même à Johnny, il les repoussa en toussotant et cracha des expectorations noirâtres. Il retourna sur son banc à boire sa pinte de scotch qu'il vida d'un trait.

Huit jours plus tard, Johnny Spark était toujours sur son banc à contempler la mer et à faire défiler  dans sa tête la tragique scène de la petite route de terre de son enfance quand cette fois, une rutilante limousine blanche s'arrêta près de lui. Deux types à l'allure vindicative, des ''armoires à glace'' en habit fait sur mesure sortirent de l'auto. L'un se plaça sur le trottoir les bras croisés, le regard stoïque tandis que l'autre ouvrit la portière aux vitres teintées.

Une grande blonde sortie de l'auto en étirant sa courte robe. Le garde du corps referma la porte et alla se placer à sa droite. Bien entourée, elle se dirigea vers Johnny.

''Bonjour Monsieur'', pourrais-je vous parler''?
''Oui''.
''Êtes-vous celui qui avez sauvé un homme des flammes l'autre jours''?
''Oui, pourquoi''?
''Cette personne aimerait vous rencontrer''.
''Cela ne m'intéresse pas, je n'ai fait que ce qu'il y avait à faire, si c'est de l'argent que vous voulez me donner, vous perdez votre temps... mais je ne dirais pas non à une ou deux bouteilles de scotch''.
''Il y a un petit problème Monsieur''.
''Ah oui...lequel''?
''Je dois absolument vous amener avec moi''.
''Et qui m'y obligera , Madame''?
''Eux'', montrant du doigt les deux imposants ''mastiffs'', et elle laissa paraître un large sourire.
L'un des gaillards cligna nerveusement de l'œil lui jeta un furtif regard un peu embarrassé et Johnny Spark perçut une certaine admiration à son égard, bien camouflée sous des tonnes de muscles. ''Eh bien, madame, s'il faut y aller, allons-y''.
Johnny monta dans la voiture et après une sinueuse course à travers le centre-ville de San Francisco, la limousine arriva devant un magnifique domaine. Elle s'immobilisa face à un portail aux forts barreaux d'acier et il s'ouvrit très lentement. Johnny pur discerner dans la cour, un certain va et vient de motocyclettes et d'automobiles de collection dans divers garages de la propriété, puis une série de caméras discrètement camouflées un peu partout aux travers les arbres et les bosquets défilant tout au long de la grande allée centrale.

Rendu devant l'immense demeure aux innombrables balcons garnis de fleurs aux couleurs chatoyantes, un vieillard aux bras remplis de tatouages pâlis par le temps vint ouvrir la portière et intima gentiment à Johnny Spark de bien vouloir le suivre. Johnny se senti tout à coup transporté dans un autre monde. Mais où était-il donc tombé, qui était donc ce personnage qu'il avait tiré des flammes?

''Où donc, suis-je rendu'', demanda Johnny au vieillard?
''Vous êtes chez Don McCourt, Monsieur, c'est mon fils à qui vous avez sauvé la vie. Ce que je vous dois, n'a aucune mesure avec les biens que vous voyez ici''.
Johnny se tut, il savait s'incliner devant les paroles empreintes des grandes émotions.
''Mon fils va vous recevoir, Monsieur Spark!''
''Comment se fait-il que vous sachiez mon nom, mon bon Monsieur''?
Le vieil homme montra un léger sourire.
''Venez, suivez-moi, Johnny Spark''.

Ils entrèrent dans l'immense demeure. Le luxe était saisissant. Un plancher de terrazo à carreaux noirs et blanc ciré à la perfection, puis, dans les deux salons de part et d'autre du hall d'entrée, de grands miroirs, des lampes Art Déco, des fauteuils de cuir authentiques, des cadrages en fines boiseries et divers bibelots ornaient ces pièces aux tapis blancs de Perse à long poils d'une propreté impeccable. Plus loin, la grande salle à manger pouvant accueillir une cinquantaine de convives, des chaises de style Louis XIV entourant une table presqu'aussi longue qu'une allée de ''bowling''. À l'opposé de cette salle, la grande bibliothèque aux larges armoires vitrées remplis de livres et documents qui auraient pu occuper des semaines entières, le plus fanatique des rats de bibliothèque. Ils passèrent par un autre long couloir et Johnny put entrevoir par une ouverture ce qui semblait être une immense verrière d'une hauteur de deux étages, des plantes tropicales à profusion et une piscine de grandeur appréciable. Puis, au bout d'un dernier passage, ils pénétrèrent dans la chambre du fils McCourt. Sa pièce était aussi grande que le carré d'une maison et mieux décorée que le plus majestueux des hôtels de luxe. Johnny, en voyant la personne qu'il avait sauvé de l'explosion, n'en croyait pas se yeux.

''Êtes-vous bien la personne que j'ai sortie des flammes''?
''C'est bien moi Monsieur'', et il se mit à rire grassement.
Johnny n'en revenait pas, de fortes ossatures, il devait bien peser dans les cent vingt kilos avec une grosse barbe noire à moitié dégarnie par le feu, de belles dents blanches et, tout comme son père, les bras garnis de tatouages.

''Comment ai-je pu vous sortir du brasier, une pièce d'homme comme vous''?
''On se le demande encore, Monsieur Spark'' et ils se mirent tous à rire comme de grands camarades.
Après un long entretien.
''Monsieur Spark, êtes-vous à San Francisco pour longtemps''?
''Je ne sais pas, je vais, je viens''.
''Pourriez-vous demeurer ici dans notre maison, encore une semaine, le temps que je récupère, j'aimerais bien faire plus amples connaissances avec vous et mon père également je crois, le souhaiterait''?
Le vieillard fit signe que oui de la tête.
''Papa, pourriez-vous montrer à Monsieur Spark ses quartiers''?
Le vieil homme lui mit tendrement la main sur son épaule et l'amena à son pavillon.

Ses appartements étaient d'un faste à couper le souffle. Il en profita pour prendre un bain dans un magnifique ''Jacuzzi'' pouvant contenir une dizaine de personnes. Puis après, il se laissa choir sur un grand lit rond aux draps de satin. Au lendemain matin, le soleil pénétra la grande pièce et ouvrant les yeux, il put se regarder distinctement dans de grands miroirs placés au-dessus de son lit. Plusieurs questions surgirent dans son esprit: pourquoi tout cela, que m'arrive-t-il, est-ce un rêve?

On frappa à la porte.

''Entrez'', dit Johnny

Une gouvernante d'âge mûr vint lui porter un magnifique couvert d'argenterie.

''Votre petit déjeuner Monsieur, quand vous aurez terminé votre repas, Monsieur William McCourt aimerait vous rencontrer dans la salle du conseil, ils débuteront une réunion dans une heure. Il y a des vêtements neufs pour vous dans la garde-robe''.
''Une réunion, dites-vous''!
''Oui, la réunion du Conseil''.
''Quel Conseil''?
''C'est à eux de vous le dire, Monsieur, moi je ne suis qu'une gouvernante''.
''Mais Madame, vous devez bien savoir ce qui se passe dans ce château''.
La dame hésita un peu, alla se placer sur le lit au côté de Johnny et lui prit la main. Il comprit rapidement que sous ses habillements et comportements effacés se cachait une personne à forte personnalité d'une très grande influence et assurément, d'une extrême puissance. Il eut, dès lors,  cette impression ou plutôt cette espèce de quasi certitude insondable qu'elle devinait ses moindres pensées.

Sachez Monsieur Spark que j'ai élevé Donald McCourt comme mon fils lorsque sa mère est décédée dans un terrible accident d'auto mais les affaires, je les lui laisse. Moi, je soigne les blessures du cœur et ça me suffit, je vous l'assure. Il n'y a que de bonnes choses qui vous attendent Monsieur Spark''. Elle lui sourit tendrement, elle mit son autre main par dessus la sienne et ajouta: ''je vous suis très reconnaissante d'avoir eu le courage d'aller sauver mon petit''.
''Petit, dites-vous, cela fait bien longtemps que vous ne l'avez pas pris dans vos bras chère Madame'' et il se mit à rire aux éclats.
''Ah, pour moi c'est encore un enfant mais c'est entre nous n'est-ce-pas''.
''Bien sûr Madame'', et elle se retira doucement de la chambre sur la pointe des pieds.

La réunion du Conseil Suprême


Johnny descendit lentement le grand escalier de marbre blanc menant au Rez-de-chaussée. Puis, un autre géant aux larges épaules, à la tête d'assassin, imperturbable, portant verres fumées avec de bonnes manières et très élégamment vêtu vint à sa rencontre.

''Avez-vous bien dormi, Monsieur'' dit-il à voix basse et dans un langage très soigné?
-''Oui, comme un roi'', répondit Johnny.
''Auriez-vous l'obligeance de me suivre Monsieur, on vous attend''.
''Très bien, je vous accompagne''.

Lorsque le garde se tourna pour passer devant lui, Johnny put remarquer à l'intérieur de son manteau de fin lainage, une arme de fort calibre bien dissimulée, mais en même temps, rapidement accessible. Il se dit en lui-même que ces personnes devaient faire les choses bien différemment de la plupart des gens.
 Au bout d'un très large couloir, ils arrivèrent devant deux grandes portes fabriquées dans un riche bois d'ébène. Le gorille frappa avec un doigt seulement, aussi doucement que s'il avait cogné sur un nid de guêpes et elles s'ouvrirent à pleine grandeur.

Un spectacle digne de la levée de rideau d'une grandiose et flamboyante pièce d'interprétation de Molière s'offrit à Johnny Spark lorsqu'il vit jaillir des centaines de milliers d'éclats lumineux provenant des nombreux lustres en cristal suspendus et dispersant l'onde sur la centaine de personnes réunies qui scandaient des :''Bravo, bravo Johnny'' et qui applaudissaient à tout rompre.

Johnny fut subitement épris d'une bouffée de chaleur qui lui monta au visage et ne comprenait pas cette trop grande effusion de sentiments. Il eut également la forte impression d'avoir affaire à des irréductibles, regroupés en une secrète confrérie et s'appliquant à vivre en marge, sans aucun compromis.

Après l'accueil triomphant, William McCourt appela solennellement Johnny au micro.: ''Veillez vous avancer dans ce cercle, Johnny Spark''.
Johnny s'avança au milieu de la forme géométrique, une sorte de mosaïque incrustée représentant un moine tenant une faux à la main. Une décoration qu'il connaissait très bien pour l'avoir vu à maintes reprises lorsqu'il voyageait par les routes de l'Ouest de l'Amérique; ces couleurs étant cousues dans le dos des épaisses vestes de cuir noirs des motards qui n'avait pas la réputation, à tort ou à raison, d'avoir un sens de l'humour très développé. L'histoire l'avait tristement prouvé dans l'après-guerre; ces types qui ne faisaient pas dans la dentelle, avaient quitté à plusieurs occasions quelques petites villes de la basse Californie après les avoir mis à feu et à sang. La vengeance des Darker's était terrible mais rien ne tenait du hasard puisque lorsqu'ils pénétraient sur un territoire pour imposer leur loi, c'est qu'on s'était dangereusement frotté à l'organisation.

William McCourt était entouré à la table du Conseil, d'une dizaine de personnes d'un âge assez avancé; certaines même paraissaient encore plus vieilles que lui.

Derrière eux, couvrant à pleine grandeur le mur de cette vaste salle de rassemblement, une gigantesque peinture d'un grand maître Italien, représentait une horde de motards qui s'approchait à la levée du jour, sur une route nationale de l'Arizona dans un fond brumeux, ocre doux et violacé. Des jeux de lumières provenant tant des murs, du plafond que du plancher, frappaient la toile pour en accentuer les détails et faire ressortir la signification profonde de cette fresque saisissante:
Le titre de l'œuvre: ''Sine Fides Nec Legis'':  ce qui signifie: ''Sans Foi, Ni Loi''.



''Bonjour M. Spark, comme vous le voyez présentement, nous tenons une réunion extraordinaire à votre intention. Il est maintenant temps de vous mettre au parfum. Vous êtes dans le repère, au quartier général des Dark's Angel. Toutes les grandes décisions qui influenceront les divers embranchements à travers toute l'Amérique et de l'Europe se décident dans cette salle. Tout ceux que vous voyez ici sont les représentants de chacun des étâts américains,  de chacune des provinces du Canada et de la France. Certains habitent tout près mais la plupart sont arrivées hier, par avion, expressément pour vous, Johnny Spark''.

Johnny ne sentait plus ses jambes mais n'osa broncher.
''Johnny, vous avez sauvé mon fils d'une mort certaine et je vous dois une grande reconnaissance. Vous avez sauvegardé également le bon déroulement des opérations de l'organisation et tous les membres réunis dans cette salle ont une dette d'honneur envers vous.
Donc, ce matin, Johnny Spark, vous pouvez faire vos demandes à l'organisation et si, cela est en son pouvoir, nous exaucerons vos vœux. De plus, mon enfant, il y a une place de choix pour vous dans l'organisation si vous le désirez.
Maintenant, c'est à vous de parler Monsieur Spark, nous sommes suspendus à vos lèvres''.

Le silence planait dans la salle et après une certaine hésitation, Johnny prit la parole: ''Monsieur McCourt, pour moi-même, je ne veux rien mais il y aurait peut-être une demande qui me tiendrait à cœur plus que tout''.

''Et laquelle, Monsieur Spark''?

''Pour une altercation avec mon père, j'ai dû abandonner ma famille et, étant sans nouvelles d'eux depuis nombres d'années, je voudrais qu'il ne manquent de rien, du moins du strict minimum''.

''C'est déjà fait Monsieur Spark et sachez que les Darker's ne se contentent jamais du strict minimum.

Johnny n'était pas certain d'avoir bien saisi le sens et la portée de cette réponse.

''Qu'avez-vous dit'', demanda Johnny, renversé par la lourdeur des propos de son interlocuteur.

''Depuis l'incendie, vos parents ont habité une veille maison abandonnée qu'ils ont réparé tant bien que mal mais au moment où l'on se parle, ils aménagent avec votre sœur cadette dans une jolie et grande demeure meublée à neuf, sur le bord d'une rivière; un coin de rêve. Ils possèdent également depuis deux jours, une auto de luxe et d'autres biens trop long à énumérer ici, qu'ils n'auraient pu se payer durant toute leur vie, tout cela acheté en votre nom...j'ai bien dit en votre nom, mon fils! Et votre mère vous embrasse, Johnny Spark.''. Cette femme ne s'était jamais complètement remis de votre départ et maintenant, je vous affirme qu' elle respire la sérénité car elle vous sait en bonne compagnie''.

Johnny éprouva tout à coup de la difficulté à pomper son air.

Puis, la voix du chef spirituel devint basse, profonde et suave.

''Pour votre père, vous n'êtes pas obligé de me croire, mais étant moi-même père d'un fils et après avoir parlé au téléphone avec lui, je peux vous assurer qu'à son timbre de voix, il aurait bien hâte de vous serrer dans ses bras. Il a regretté amèrement son geste, étant sous l'emprise de la colère. Il ne pensait pas que vous seriez si défait par ses paroles et que vous mettriez sa menace à exécution''.

Instinctivement, tel l'ultime limite au mouvement descendant de la tête du bélier pompant le pétrole, le regard de Johnny se dirigea au plancher, attiré par une très grande force, comme un aimant sur une plaque d'acier et il lui aurait été impossible de lutter contre elle.

Discrètement, William fit signe aux membres réunis, afin de conserver le monastique recueillement et de ne pas dissiper la lourde atmosphère qu'on aurait pu trancher au couteau.


Les larmes coulaient sur les joues de Johnny Spark et il avait maintenant les deux pieds, bien, mais extrêmement bien cloués au sol. Durant bien des années, il avait tellement rêvé à une belle situation qui lui aurait permis de revenir la tête haute dans sa ville natale, de faire reconstruire la maison de son enfance et ainsi expier sa faute. Malheureusement, le destin ne l'avait favorisé. Allant d'un emploi sous payé à un autre, il avait abandonné tout espoir depuis longtemps et la boisson devint son échappatoire. Et, voilà que tous ses rêves se réalisaient en un coup de baguette, comme par enchantement. Il cherchait en vain une explication à tout cela, complètement abasourdi, dépassé, il était précipité dans un tourbillon, et il ne comprenait plus rien, le, le noir total. Puis lentement, il essuya ses yeux, et, la gorge étranglé par l'émotion: ''Mais, comment Est-ce possible, comment pouvez-vous être si bien renseigné sur moi,'' demanda Johnny''?

Et dans la salle, ainsi qu'à la table du Conseil, tous se mirent à rire.

William McCourt, heureux de tout l'impact émotionnel produit sur Joihnny, reprit le micro: ''Monsieur Spark, les Dark's Angels ont de grands moyens: vous ne pouvez même pas encore l'imaginer. Le lendemain de l'incendie, vous souvenez-vous qu'un policier vous avait demandé ce que vous faisiez sur ce banc et de décliner votre nom et provenance''.

''Oui, mais'' Johnny se mit à réfléchir, ''ce policier...'' Il comprit en un claquement de doigt, l'incroyable et l'étonnante force de frappe des Darker's.

''Vous voyez, Monsieur Spark que nous avons de grands moyens et ce n'est que la pointe de l'iceberg, mon enfant. Lorsque nous aimons une personne, Johnny, nous l'aimons à mourir et le contraire est aussi vrai. Nous sommes véritablement de grands sensibles.''

Cette remarque ne manqua pas de dégourdir les gens de la salle et de provoquer des rires étouffés.

Johnny sourit, poussa un soupir, regarda une partie des membres des deux côtés de la tribune du conseil Suprême et rebaissa la tête.

''On connait tout sur vous, Monsieur Spark et nous sommes certains que vous avez les qualités requises pour devenir un membre en règle des Dark's Angels.
''Est-ce mon père qui vous a donné tous ces renseignements ou ma mère, mes oncles'', rétorqua Johnny?

''Non, c'est le procureur d'une petite ville de l'Arkansas''!
''Un procureur d'une petite ville''? dit Johnny encore étonné.

Et William, baissa davantage la voix comme pour forcer une chaleureuse intimité. ''Oui, c'est un homme qui nous donne beaucoup de fil à retorde mais quand on lui a mentionné votre nom, il est devenu doux comme un agneau''.

''Mais Monsieur McCourt, je ne connais aucun procureur''.

''Ah oui vous le connaissez Johnny Spark et même, très bien''.

Il y eu un autre long silence.

''C'est Fox Randall, Johnny''.

''Fox Randall'', dit Johnny apposant le doigt sur sa lèvre.

Fox Randall était pour Johnny le seul grand ami qu'il n'ait jamais eu. Des amis inséparables comme les deux doigts de la main depuis leur tendre enfance. Fox avait assisté à la scène tragique de la petite route de terre puisqu'il était bien caché sous des buissons. Lorsque Johnny fut par terre à sangloter, que son père lui tourna le dos, il alla le consoler du mieux qu'il le pouvait, ensuite sans essayer de le retenir, ils se serrèrent dans les bras l'un et l'autre et se firent de déchirants adieux. Ce geste avait mit fin à leur plaisirs d'adolescents et ils se mirent à vieillir rapidement, trop rapidement. Fox fit de longues études en droit. Sa pensée et son sale caractère intransigeant le portèrent dans les hauts niveaux judiciaire de l'Arkansas.

Puis, Johnny revint à la réalité et regarda le chef spirituel des Darker's.

''Ce Fox Randall, Monsieur Spark nous a dévoilé votre vraie nature, et entre autre, il nous a raconté, comment à l'école, vous vous faisiez un point d'honneur à le défendre contre certains de ses camarades de classe qui s'amusaient à s'en prendre à lui à cause de sa petite taille. Vous avez peut-être légèrement dévié de votre route, dû à certain événements regrettables mais j'ai la certitude que vos racines sont bonnes. C'est pour ces qualités que nous vous avons choisi, indépendamment du fait que vous ayez sauvé mon fils. Nous aurions pu vous couvrir d'or, mon enfant mais nous avons mieux à vous proposer. Nous avons besoin de vous! Est-ce que vous voulez faire partie de notre organisation, Johnny'', lui demanda William?

''En quoi pourrais-je lui être utile''?

''Il ne faut pas vous fier à ce que l'on dit de nous dans les journaux, Johnny. Nous brassons de grosses affaires, j'en conviens mais nous répondons à certains besoins des gens de notre société. Notre but est de vous former et de vous équiper afin que vous puissiez vous défendre convenablement. Que vous reste-t-il dans la vie, Johnny Spark? Quel est votre destin? Courir les routes comme jadis et finir, les boyaux brûlés par l'alcool! Tant qu'à courir les routes, pourquoi ne pas couvrir notre belle Amérique pour le compte des Dark's Angel''?

À ces dernières paroles, le visage de Johnny s'illumina. Être libre comme l'aire, voyager, ne plus avoir faim, être reconnu et enfin, des gens lui portaient une attention qui lui avait bien manqué dans sa jeunesse. Se battre, même jusqu'à la mort, pourquoi pas, de toute façon, son père l'avait déjà tué. Défendre l'honneur de son organisation, en être le chien de garde; c'était dans ses cordes et ça lui allait comme un gant. A part son père, Johnny Spark n'avait jamais eu peur de personne! ''Monsieur McCourt, j'en serais des plus heureux. Quelle serait ma mission''?

''Vous seriez notre représentant, notre messager pour tout l'Ouest de l'Amérique du Nord. Vous irez à la rencontre des groupes de motards et vous veillerez à remettre nos brebis égarées dans le droit chemin. Vous serez notre émissaire, nos yeux, notre voix! Vous aurez tous les pouvoirs, Johnny Spark et vous devrez en user à bon aloi car vos décisions seront exécutoires. Personne, j'ai bien dit personne dans cette salle, incluant les dirigeants du Conseil Suprême ne sera à l'abri de vos jugements.''

Et sans hésiter: ''Je m'y engage solennellement, Monsieur McCourt'', sachant bien que tel était son destin.

''Nous sommes bien heureux, mon fils, de votre décision. Si tout va bien et je suis persuadé que tout ira pour le mieux car nous y veillerons, vous devrez dans deux ans, comme le veut la coutume, subir l'initiation. Ce n'est qu'une simple formalité car tous vos pouvoirs prennent force à l'instant''.

Les membres, certains en larmes, applaudirent, et, ils vinrent donner l'accolade à Johnny; la réunion du Conseil Suprême venait de prendre fin.



La formation de Johnny Spark


Pour débuter, le  lendemain, Johnny se rendit voir le docteur Rod Springer, un des piliers des Dark's Angels et médecin attitré des Darker's de San Francisco. Sa clinique était située dans un chic building du Centre-Ville.

Après un examen minutieux, le médecin le regarda bien en face: ''Est-ce que vous tremblez souvent comme cela''?
Johnny baissa les yeux: ''c'est peut-être la boisson, docteur''.
''Monsieur Spark, Est-ce que vous auriez été capable de vous arrêter de boire pendant dix jours lorsque vous étiez sur les routes''?
''Je ne crois pas, docteur''.
''Johnny, croiriez-vous que vous soyez alcoolique''?
''Je n'ai jamais osé me poser la question mais cela ne me surprendrait pas''.
''Vous n'avez pas à avoir honte M. Spark, moi-même, je suis un alcoolique, ainsi que mon grand ami, William McCourt. Vous savez mon fils, même si nous sommes William et moi des personnes âgées, notre vie de jeunesse fut à maintes reprises. très mouvementée. Il y eut de ces nuits, avec les plus belles filles de la Californie, où le Southern Comfort et le rhum coulaient flot. Oui, mon fils, de très belles nuits,'' dit-il avec une certaine nostalgie imprégnée dans sa voix, ''du moins, celle dont je me souvienne car quelque fois, nous dépassions de plusieurs verres la limite de l'Intolérable.

À 34 ans, mon fils, vous n'aurez pas de difficulté à vous en sortir. Il n'y a qu'un seul moyen d'y arriver, vous le savez n'est-ce-pas, Johnny''?
-''Oui, je le sais, ne plus boire. Les Dark's Angel sont ma raison de vivre, docteur, ils comptent sur moi, je n'ai plus besoin d'alcool. Après tout ce que l'organisation a fait pour famille, boire, serait pour moi le plus grand des déshonneurs''.
''D'accord, mon fils, vous m'avez convaincu. Vous aurez des tremblements encore quelques semaines et plus une goutte. Bonne chance, Johnny Spark''.

Après le dîner, Johnny se rendit dans un autre quartier un peu moins huppé cette fois, chez un maître-tatoueur Chinois. Il s'asseya sur une petite chaise de bois et l'homme lui demanda quel modèle il voulait parmi son grand inventaire décorant les murs de l'atelier.
Johnny sortit de sa poche de manteau, un bout de carton rigide qu'il montra au tatoueur. ''Celui-là'', dit Johnny.
Le Chinois montra un sourire, caressa le dessin du bout de ses doigts comme s'il avait entre ses mains la photographie de son propre enfant.

''Vous devez vous le mettre sur l'avant-bras droit n'est-ce-pas''?
''Oui'', dit-il un peu surpris.
''Je fais pratiquement tous les tatouages officiels des Dark's Angels mais celui  dessiné avec des feuilles de laurier et son inscription, ce n'est pas moi qui l'ai dessiné mais je ne pourrai jamais l'oublier''.
''Pourquoi''?
''Je ne me souviens plus de son nom mais c'est un vieil homme avec une profonde cicatrice à la joue droite''.

Johnny, tout à coup, se souvint que l'homme assis à la droite de William, à la réunion du Conseil Suprême était balafré de ce côté de la figure; c'était obligatoirement lui, il avait à peu près le même âge que son chef.

Le tatoueur continua son histoire. ''Un jour qu'une bande de voyous vinrent dans mon atelier pour le saccager et me voler, ce Monsieur entra et sans qu'il n'ait à dire  un seul mot, les intrus replacèrent ce qu'ils avaient jeté par terre, payèrent les dégâts et s'excusèrent platement''.

Décidément, William, le docteur et l'homme à la cicatrice durent former un trio infernal dans leur jeunesse, pensa Johnny. Il n'en finissait plus d'être étonné de ces hommes probablement jadis, ignares des lois. Sa conception des personnes âgées, sagement assis sur leur chaise berceuse, les jambes bien au chaud sous une épaisse couverture de laine contrastait étonnement. Ces gens arrivées à un âge vénérable, aux doux traits du visage et dégageant enfin une tendre plénitude ne s'appliquait certainement pas à ces trois lascards. Se comparant à eux, Johnny Spark se sentit comme un enfant d'école.

''Vous n'avez pas encore idée, Monsieur Johnny du pouvoir que vous détenez avec cette image. Toutes les crapules et assassins de ce pays le connaissent bien et si l'un d'eux tenterait de vous faire un mauvais parti, il serait immédiatement recherché du nord au sud, d'est en ouest, peu importe le continent et il regretterait sa venue au monde. L'Amérique est à vos pieds, Monsieur Johnny''.

Johnny Spark en avait la chair de poule, il semblait détenir un pouvoir inouï, incommensurable.

 L'artiste nettoya ses aiguilles et entreprit son œuvre avec une attention et une minutie digne des maître-graveurs.

Après la séance, le bras rougis, boursoufflé, Johnny s'en retourna au domaine à bord de la limousine et son chauffeur attitré qui l'attendait lors de ses déplacements.

La balade

Pendant trois jours, Johnny laissa reposer son bras et profita de son congé pour visiter le domaine en compagnie de Donald qui était maintenant assez bien rétabli.
Le domaine situé en banlieue de San Francisco couvrait en superficie l'équivalent de huit terrain de football. Fortement sécurisé d'une haute barrière de fer forgé, tout le secteur limitrophe était surveillé d'une panoplie de détecteurs de mouvements, déclenchant de forts projecteurs. Chaque pouce carré était scruté à la loupe par un système de vidéo très sophistiqué et par de solides caméras à l'épreuve des balles.
 Une double clôture à deux passages où circulaient de féroces Doberman auraient empêché n'importe quel indésirable d'y pénétrer.

Pour bien cacher cette haute technologie, un immense boisé conservé à l'état naturel, était sillonné de quelques petits sentiers où il faisait bon de méditer. Quelques animaux sauvages agrémentaient en tout ce beaux décor.

Au centre de la forêt, le château où la Maison Blanche comme certain s'amusaient à le décrire, comptait de grands arbres et haies sculptées avec de vastes jardins ou deux horticulteurs y travaillaient à temps plein. Un cours d'eau naturel où plusieurs petits ponceaux le traversait tout le long du parcours. Il était ensemencé de nombreuses variétés de poissons et d'exotiques plantes tropicales et aquatiques dégageant un parfum  odorant.

Johnny visita ensuite tous les ateliers et garages de la propriété tout en discutqant avec les mécaniciens qui s'affairfaient à réparer les motocyclettes et voitures de luxe. Au derneir bâtiment, il vit une motocyclette de collection entourée de quatre mécaniciens, des connaisseurs en la matière qui démontaient avec des outils très sophistiqués, le moteur et la transmission.



-''Elle est très vieille et surtout très belle'' dit Johnny à Donald.
''Elle est même superbe, Johnny, c'est une Harley Davidson 1948, la dernière des suspensions à ressort, mon père la surnomme ''sa grosse Bertha''.
-''Elle est à votre père''?
-''Non, plus maintenant''.
-''Ajh, il l'a vendu''.
-''Non, il l'a donné''.
-''Donné'' dit Johnny, quasiment estomaqué.
-''Oui donné, et à toi Johnny''.
-''Mais, mais, mais, je ne peux pas''.
-''Et pourquoi tu ne peux pas'' lui dit Donald avec un large sourire?
-''Mais,..je ne sais pas'' il me semble que c'est...''
-''Trop...mais ce n'est jamais trop lorsque l'on représente les Darker's. Accepte tout ce qu'il te donne, Johnny, il y tient beaucoup''.
''Est-ce que je peux lui faire inscrire une phrase sur le réservoir d'essence''?
''Tu peux lui mettre une annonce de Pepsi ou de Coke de chaque côté si tu le désires, elle est à toi''.
''Un Américain, un vrai Donald, ne boit que du Coke''.
Puis Johnny s'avança vers les chirurgiens de la mécanique comme un enfant de chœur se dirigeant vers l'autel et discuta longuement avec eux.

Après ses trois jours de congé, Johnny commença au gymnase du château, un entraînement physique intensif comportant de la musculation suivi d'un régime alimentaire bien équilibré, des séances de boxe, de judo et de karaté avec les meilleurs maîtres de San Francisco. Johnny n'avait pas à utiliser ces mouvements d'art martiaux contre les siens mais contre des bandes rivales, la chose devenait possible, si bien que ce qu'il apprit visait les parties du corps les plus vulnérables, soit les parties génitales, la gorge, les yeux, les oreilles, c'est tout mais chacun des mouvements appris, environ une dizaine tout au plus, n'avait qu'un seule but, soit celui d'enlever la vie de façon fulgurante.

Un certain soir revenant de cet entraînement, Johnny entendit du bruit alors qu'il s'apprêtait à entrer dans sa suite. Doucement, il entrouvrit la porte pour distinguer dans une faible lumière d'ambiance, dans un Jacuzzi, sans vêtement, la plantureuse belle blonde, celle qu'il avait rencontré lorsqu'il était à boire sur son banc dans le centre-ville de San Francisco. Elle lui offrit  un joli et tendre sourire et de l'index lui signifia de s'approcher. Il referma la porte et quand il la rouvrît deux jours plus tard, Johny Spark se sentit épuisé, certes, mais heureux.

Au bout de huit mois, Johnny se sentait fin prêt pour l'aventure. Pendant sa formation, les résidents du domaine lui avaient fourni des renseignements à savoir ce qu'était un Darker's, comment se comporter avec lui, toucher sa corde sensible, l'émouvoir, comment arriver à ses fins sans l'offusquer et, le plus important, permettre au Darker fautif de rentrer dans le rang et se racheter avec dignité. Pour Johnny Spark, un Darker, c'était comme un membre d'une même famille tout comme lui, un être sacré, malgré tout ce qui peut se présenter comme situation. Pour qu'un homme fasse partie des Darker's, il avait dû à un moment ou un autre de sa vie, le mériter et il était persuadé que chacun de ses frères Darker avait certainement, quelque part, bien enfouie au fond de leur cœur, une histoire aussi triste que celle de la petite route de terre de son enfance.

À la veille de la date prévue pour son départ, William et Don convoquèrent Johnny à la bibliothèque du château.

''Tu es maintenant fin prêt à remplir ton mandat, Johnny, comment te sens-tu,'', lui demanda le fils.
''Très heureux, Donald'', dit-il calmement.
''Mon père a quelque chose à te donner et c'est pour cette raison que nous t'avons fait demander ce soir''.
William s'étira de son confortable fauteuil, il tendit le bras, prit sur la table en acajou un précieux coffret d'argent et l'ouvrit. Il le glissa en direction de Johnny et lui dit: ''Voilà mon fils, un autre présent qui je l'espère saura t'aider dans les moments difficiles''.
Johnny le sortit de son écrin de velours: un colt 45 à la crosse incrustée d'un crane travaillée dans la nacre d'eau douce.



''Ce pistolet, Johnny, m'a toujours accompagné lorsque j'ai mis sur pied les Darker's, au tout début après la guerre, ainsi que votre moto. Je ne me suis jamais servi de cette arme mais il n'aurait pas fallu que quelqu'un...J'ai eu ce semi-automatique lorsque nous étions en guerre contre le Japon. J'étais pilote de chasse sur un Thunderbolt du 48 Squadron de la mer du Pacifique. Lorsque j'en suis revenu, nous n'étions pas toujours bien accueillis à San Francisco. Mes parents étaient décédés depuis longtemps, mes frères et sœurs avaient leur famille et je ne voulais pas vivre à leur crochet. J'ai donc pris comme vous la route, j'ai recueilli les gars, les guerriers de l'Amérique n'ayant plus de chez-soi et j'ai fondé une immense famille''.

Johnny l'écoutait avec attention, adoration même et buvait ses paroles.

Puis, majestueusement, aussi majestueusement que la grandeur d'âme acquise et enrichie par les nombreuses années d'expérience marquent un individu, l'homme se leva.

''Que Dieu vous accompagne, Johnny Spark et je suis persuadé que vous vous comporterez en bon chrétien''.

Don le serra dans ses bras, puis William fit de même et lui dit ces dernières paroles: ''Vas, mon fils et reviens nous voir le plus tôt possible''.

À l'aurore, Johnny poussa sa lourde motocyclette jusqu'au portail de la limite du domaine afin de ne pas réveiller personne et démarra sa magnifique Harley Davidson 1948 chromé comme il se doit.

L'Amérique l'attendait.



                          Le Grand Départ
Texte présentement en écriture

Les lignes pointillées sur les voies de l'Interstate 210 Sud, devaient se refléter comme dans un miroir sur les jantes de roues brochetées de la bête d'acier. Même si elle était préparée depuis longtemps, Johnny ne voulut enfourcher son bolide qu'à ce jour fatidique du grand départ, une question de principe.

Après quelques kilomètres, il commença tout juste à ressentir la fougue et la puissance de sa moto. Il caressa le guidon nickelé, et frotta son bouchon du réservoir d'essence avec le pouce, comme pour le polir. Ensuite, il effectua quelques pointes de vitesse. C'était une vrai bête, une pure race.
-''Divin cette mécanique'', dit-il à haute voix.
Fin seul sur l'Interstate, il se mit à ziggzailler en travers des voies afin de bien saisir la portée du monstre de fer. Il comprit la sensation du cow-boy à vouloir maîtriser le bronco. Après maintes essaies, elle fut sienne et fit corps avec ce morceau d'acier typiquement américain.



...suite très bientôt pour le début de ses captivantes aventures.







Mis à jour le 07 Mai 2017

suite bientôt... 


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